La publicité et le placement de produits sur les blogues de parents
Je n’aime vraiment pas la publicité sur à peu près toutes ses formes. En 2004, le président d’alors de la chaîne de télévision française TF1, Patrick Le Lay, affirmait qu’essentiellement, il vendait à ses publicitaires du « temps de cerveau humain disponible ». Vous êtes, pendant les pauses commerciales, en attente du retour de l’émission, disponibles et réceptifs à la présentation d’un produit. La publicité sur les blogues n’en fait pas tout à fait exception.
Je vois un certain problème éthique à faire de la publicité pour un produit ou une marque sur son blogue sans l’annoncer explicitement et le distinguer clairement du contenu original et « gratuit ».
Les liens naturels
Ce n’est pas encore le cas pour ce blogue-ci, mais on m’a déjà offert sur mon blogue personnel de la publicité ciblée « discrète » dans le contenu de mes articles ordinaires. On m’a demandé d’ajouter des liens à l’intérieur des articles, on a spécifié que ceux-ci devaient faire au moins 500 mots (pour avoir l’air « naturels ») et on me donnerait un montant d’argent (somme toute dérisoire) en échange. J’ai répondu à la dernière demande en date avec une condition principale avant la négociation du prix: l’affichage explicite que le lien est une publicité payée. Aucune réponse.
Les marques ont tout intérêt à ce qu’on parle de leurs produits de manière « naturelle », c’est-à-dire, sans échange monétaire et parce que l’article est considéré comme une référence. Dans le domaine du SEO (Search engine optimization, soit optimisation des moteurs de recherche), on appelle ce type de lien un lien naturel (comme ce lien lui-même l’est). Olivier Duffez, que je suivais dans mes débuts sur la blogosphère, rappelle qu’il faut qu’un lien ait l’air naturel pour être considéré comme optimal en termes de référencement. Les moteurs de recherche ne peuvent pas être parfaits et ne détectent pas toutes les publicités incrustées. Les marques raffolent donc des blogueurs à thématique parentale pour y intégrer des liens vers leurs produits et contourner les algorithmes des moteurs de recherche.
L’espace de lecture disponible
Avant de commencer à bloguer, je suis allé explorer un peu l’univers (très modeste) des pères blogueurs. J’ai cessé de suivre deux blogues de pères suite à des plogues de produits très peu subtils, voire complètement hors contexte. Je n’arrive plus à trouver le site d’un père où j’ai vu un concours permettant de gagner une scie sauteuse intégré dans un billet qui parle d’un projet qu’il avait réussi à réaliser grâce à ce produit merveilleux… peut-être a-t-il été supprimé d’ailleurs.
Dans le cas de Je suis papa, son dernier placement de produit commence même en tentant de nous mettre de son bord, comme parent sceptique face aux promesses des produits et aux « coups marketing »:
En matière de consommation, y’a rien de pire que les promesses non tenues. Du coup, lorsque vertbaudet lance son pantalon indestructible, on flaire le coup marketing, et on s’inquiète de la réalité du produit : « Indestructible ? vertbaudet nous prend pour des mouflons ou quoi ? »
Et tiens, finalement, ce produit miraculeux, lui, n’est pas indestructible! Le blogueur y va même d’éloges, allant jusqu’à parler de « la marque qui place les enfants d’abord » pour remplacer son nom. Le tout bien placé dans un article où il nous parle comme d’habitude de sa fille.
Parfois, c’est plus subtil. Papa Panique va intégrer certaines marques et un lien naturel dans un article qui traite vaguement de la sexualisation des vêtements. Par contre, sur ce blogue, certains produits sont aussi utilisés exactement de la même manière qu’ils ne le seraient dans un magazine typique, à l’exception qu’on remplace un mannequin professionnel par sa petite fille. C’est devenu un type de billet récurrent.
Tout ceci existe plus ou moins subtilement dans l’univers des blogues parentaux et il me semble très important de comprendre les mécanismes derrière ces intérêts publicitaires. Alors qu’on lit un article où on s’attend à avoir un contenu pertinent et lié à la réflexion personnelle d’un blogueur que l’on suit autrement avec intérêt, on est très certainement « disponibles » pour de la publicité. Avoir un esprit critique, réagir lorsque ces cas de « plogues » sont indécentes et continuer à choisir la pertinence me semblent des outils nécessaires à mobiliser.
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